Athènes (Grèce) : Expulsions à Exarchia

Près de 150 personnes, principalement des migrant.e.s ont été interpellé.e.s hier matin lors d’une intervention policière en vue de l’expulsion de plusieurs squats (4 au total) dans le quartier d’Exarchia. Un énorme dispositif avait été mis en place (bus de CRS, voltigeurs, jeeps, police antiterroriste, la plupart des rues fermées). La majorité des personnes arrêtées ont été envoyées à Petrou Ralli où se trouve le bureau de l’immigration et un centre de détention (selon les chiffres de la police 10 auraient été par la suite envoyés en centre de détention en vue d’une expulsion). Continuer la lecture de « Athènes (Grèce) : Expulsions à Exarchia »

Déclinaison magnétique

Résultat de recherche d'images pour "bateau à rame noir et blanc"Quiconque sait se servir d’un bateau à rames, quiconque a une fois tiré ne serait-ce qu’un coup de feu, n’importe quel écolier qu’on embête avec le parallélogramme des forces sait que gérer plus d’une seule variable est une affaire délicate. Le rameur doit compenser le courant et le vent, le tireur doit viser devant, calculer la dérive, le poids du projectile et les déplacements de sa cible. S’il tire droit sur elle, il la manquera et touchera quelque chose qu’il ne visait pas.

Dans tous les phénomènes sociaux, le nombre des variables est considérablement plus élevé. C’est pourquoi le calcul bien connu de n’importe quel conseiller municipal, chargé d’affaires ou petit avocat exige du coup d’œil, de l’entraînement et une faculté d’appréciation. Plus les forces contraires sont puissantes par rapport aux vôtres, plus la difficulté s’accroît.

Les mouvements qui visent un changement révolutionnaire dans les pays capitalistes sont seuls à ignorer cela. Avec une belle innocence, ils marquent leur objectif et foncent droit dessus. Mais généralement leur adversaire n’est déjà plus là où ils le voient. C’est pourquoi les actions politiques atteignent rarement ce qu’elles souhaitaient. Plus souvent, elles obtiennent le contraire. Et l’idéologie est ce qui les en prémunit le moins.

L’opposition extraparlementaire et ses prolongements ont aidé la social-démocratie qu’ils entendaient combattre à remporter la victoire en Allemagne. Les marxistes-léninistes, par leur agitation, ont attiré l’attention des syndicats sur leurs erreurs les plus dangereuses dans le déroulement de la production. Les cellules rouges, dans les universités, ont fait avancer les réformes structurelles depuis longtemps nécessaires. Les jardins d’enfants révolutionnaires ont expérimenté de formes nouvelles dont les pédagogues ne voulaient pas entendre parler. L’opposition au système est de cette façon devenue le simple relais de la modernisation. Elle a ainsi fait avancer le processus d’adaptation de la société capitaliste de façon plus décisive que les défenseurs de celle-ci.

La gauche militante a réagi à cela en se radicalisant davantage. À long terme, elle a ainsi aidé le régime qu’elle croyait combattre à s’adapter de mieux en mieux aux données de la mondialisation.

L’aveuglement face aux plus simples règles de base de la mécanique politique traduit, tout comme la foi superstitieuse en des doctrines idéologiques, le caractère quasi religieux d’un mouvement auquel on peut trouver plus d’un parallèle dans le premier socialisme du XIXe siècle.

Extrait de “Tumulte” – Hans Magnus Enzensberger

Un film

Le 5 mars 1998, trois anarchistes accusés d’avoir saboté les chantiers du TAV en Val de Susa sont arrêtés à Turin.
Le 28 mars 1998, l’un d’eux, Edoardo Massari, dit Baleno, est retrouvé pendu à la prison de Turin.
Le 11 juillet 1998, sa compagne Maria Soledad Rosas dira elle aussi adieu à cette existence, alors qu’elle se trouve assignée à résidence.
En 2003, Amor y Anarquia, est diffusé en Argentine, le roman que l’écrivain Martin Caparròs a tiré de la mort tragique de Sole et Baleno. Pour la rédaction du livre, qui n’hésite pas à s’attarder morbidement sur les détails les plus intimes de la courte vie de l’anarchiste argentine morte en Italie, le vautour argentin a profité de la collaboration de quelques chacals (encore) présents chez les anarchistes de Turin.
Le 22 novembre 2015, Mauricio Macri est élu 57ème Président de l’Argentine. Il a été marié plusieurs fois et a des enfants. Sa fille aînée, dont le prénom est Agustina, après des études de sociologie se consacre au septième art.
Le 1er août 2017, l’anarchiste argentin Santiago Maldonado se volatilise dans la nature, à Cushamen. Ce jour-là, il a participé à des barrages routiers en solidarité avec la lutte des Mapuches, une population indigène qui se bat depuis des années après l’achat de ses terres par la famille Benetton (qui veut la libérer de l’inutile présence humaine pour la destiner uniquement à l’élevage de bétail lainier). La manifestation est dispersée par l’intervention énergique des forces de l’ordre, la gendarmerie nationale, sous les ordres directs du ministre de la Sécurité (lui-même sous le contrôle du président Macri). Certains témoins voient Santiago Maldonado entouré d’agents durant les charges. Son corps torturé sera retrouvé après 78 jours au fond d’un puits. Ce n’est pas le premier et ne sera pas le dernier des desaparecido [disparus, ndt] du pays sud-américain. Continuer la lecture de « Un film »

Opération Renata (Italie) : Une lettre de Stecco depuis la prison de Tolmezzo

Chers compagnons et compagnonnes,

Est venu le moment de dire quelque chose sur ce qui s’est passé en février.

Un peu plus de deux mois se sont écoulés depuis notre arrestation dans le cadre de l’opération Renata, et je peux dire que je suis serein et fort, sûr comme jamais que la lutte continue malgré les coups portés par l’État.

Mon arrestation à Turin, près de Corso Giulio, s’est déroulée dans le calme vers 17 heures. Alors que je quittais le compagnon avec qui je me trouvais, j’ai remarqué le typique policier en civil devant moi à l’arrêt de tram, quelques secondes plus tard je me suis retrouvé encerclé. Je peux dire que tout s’est déroulé avec beaucoup de tranquillité, et je dois dire avec une « gentillesse » ennuyeuse, par opposition à la façon dont mes compagnons et compagnonnes ont été traités dans le Trentin. Continuer la lecture de « Opération Renata (Italie) : Une lettre de Stecco depuis la prison de Tolmezzo »

Seulement en fin de semaine

« Je ne sais même pas ce que je ferais de mes samedis si il n’y avait plus de mouvement. Qu’est-ce qu’on va foutre si ça s’arrête, y’a pas moyen. »

paru dans lundimatin#189, le 29 avril 2019


A : Alors, avez-vous commencé la guerre civile ?
B : (Effrayé) Guerre civile ?
A : Et quoi d’autre sinon ?
B : Je ne sais vraiment pas. Peut-être que tu veux juste te moquer de moi. Pour cela on n’a du temps que le week-end.
A : Pour quoi faire ?
B : Justement ce que tu appelles la guerre civ…
A : N’avale pas ce mot de travers !
B : En bref, pour Wackersdorf* et le reste. Mais depuis longtemps maintenant nous avons pour cette raison, renoncé à nos saunas du samedi et nos concerts du dimanche. Nous les avons sacrifiés.
A : Félicitation pour le sacrifice. Tu dis seulement samedi et dimanche. Mais tu penses que les femmes sur la Place de la Bastille, il y a 200 ans aient compris ce « seulement » ?
B : Comment ? Mais essayes de te mettre un peu à ma place s’il te plaît.
A : Dans quoi ? En qui ?
B : Dans notre vie à tous. Pendant les jours travaillés, nous n’avons pas de vraiment le temps pour des choses pareilles. (Regarde l’horloge)
A : « Pour des choses pareilles », très bien dit. Tu es pressés ?
B : En fait, oui. (Mais il reste quand même) Ou tu penses que je devrais proposer à Line de tout abandonner ? Littéralement tout ? Son travail ? Et la voiture ? Et moi ? Et les petits ? Et la télé ?
A : Surtout pas la télé. Continuer la lecture de « Seulement en fin de semaine »

UN MOIS DE MAI ANARCHISTE

s-m-subversive-may-2019-in-solidarity-with-the-cap-1.jpgCertains pensent que le premier mai est une fête réformiste. En effet, cette date a été récupérée par la gauche et même par de nombreux États. Le 1er mai est officiellement aujourd’hui la fête du Travail, et à ce titre un jour férié dans de nombreux pays, durant lequel on célèbre le dur labeur, et les organisations syndicales (quelles soient anarchistes ou pas) en ont fait leur date principale de l’année, où chacun sort avec son drapeau et sa banderole pour parader dans les rues, en mode carnaval de la gauche.

C’est en fait plutôt drôle que des réformistes célèbrent une date pareille, car le premier mai pour les anarchistes ce n’est pas la fête du travail, mais la commémoration de ce qui s’est passé en mai 1886 à Chicago (États-Unis), lorsque des travailleurs, anarchistes, souvent migrants (allemands, irlandais, italiens, etc.), ont lancé une grève massive pour travailler moins d’heures (les fameuses grèves pour obtenir la journée de travail de huit heures). Dans les journaux de ces anarchistes (certains écrits en allemand, comme le Arbeiter Zeitung) il y avait des appels à prendre les armes contre les patrons et la police, des appels à fabriquer des bombes. Et c’est en effet ce qui s’est passé, les mots n’étant pas que de l’encre à cette époque, et lors d’un rassemblement au Haymarket réprimé très violemment par la police (à l’époque cela veut dire qu’il y a eu des morts) une bombe a été lancée sur des policiers, et un policer fut tué par celle-ci, et sept autres flics furent tués dans la bagarre qui suivit.

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Turin (Italie) : Présence solidaire avec les inculpés de l’opération Scripta Manent

La première partie du procès pour l’opération “Scripta Manent”, suite à laquelle sept compagnons et compagnonnes sont en détention préventive depuis plus de deux ans, arrivera à sa conclusion dans les premiers mois de l’année 2019, avec la sentence en première instance.

Cette enquête concerne une série d’attaques signées FAI et FAI/FRI [Fédération Anarchiste Informelle / Front Révolutionnaire International, NdAtt.] qui ont eu lieu entre 2003 et 2012, contre les forces armées (commissaires, casernes des Carabinieri et RIS [Reparto Investigazioni Scientifiche, la “police scientifique” des Carabinieri; NdAtt.]) et des hommes d’État (maires, le ministre de l’Intérieur), des journalistes, des entreprises engagées dans la restructuration des Centres de Rétention Administrative pour migrants, ainsi que le directeur d’un CRA. Dans cette enquête rentrent aussi les blessures aux ingénieur Adinolfi, PdG de Ansaldo Nucleare, pour lequel il y a déjà eu un procès et qui ont été revendiquées, en tant qu’action de la Cellule Olga FAI/FRI, par Alfredo e Nicola, qui sont en prison depuis 2012.

.Les accusations sont la création et la participation à une association subversive (art. 270 bis du Code pénale), quelques délits spécifiques (art. 280), en plus de la provocation à crimes et délits et l’apologie de crimes (art. 414) pour des articles, des sites web, des blogs et des projets éditoriaux anarchistes.Ce procès s’est fait remarquer pour le fait que le débat interne au mouvement anarchiste a été utilisé dans un jeu d’interprétations et des différenciations monté de toutes pièces, que le Procureur de service tente d’utiliser contre les anarchistes eux-mêmes, en essayant de condamner nos compagnons et de faire le procès des vingt derniers années de l’histoire de l’anarchisme et de la solidarité anarchiste.

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Fascisme, anarchisme, guerre

Le mot « fascisme » est à la mode. On le prononce à toute occasion et sans occasion. Celui qui se fâche avec son voisin le traître de « fasciste », tout en ne comprenant pas toujours ce que ce terme signifie bien exactement.

Voyons un peu, aussi brièvement et explicitement que possible, le sens du mot « fascisme ». C’est l’expression brutale ce violente de l’autorité, imposée sans discussion permise. C’est ainsi qu’il est compris couramment. Mais à mon avis, tous les autoritaires, c’est-à-dire tous les partisans de l’autorité, en en détenant une parcelle, sont des fascistes, plus ou moins déguisés, mais tout aussi dangereux pour la liberté. la vraie, saine et humaine, sinon plus que les « purs ».

Bon nombre de « démocrates de la base » se récrieraient en lisant ces lignes et diraient, eux aussi, que « j’y vais un peu fort », eux qui se croient sincèrement, ardemment « anti-fascistes ». Et pourtant, combien de faits sont là pour le prouver. Les démocraties, c’est-à-dire les formes doucereuses du fascisme, en promettant beaucoup : liberté intégrale, bien-être, pain, bonheur et jouissance sur toute ta ligne, et incapables de réaliser ces promesses qui ne peuvent être que du bluff électoral, préparent le lit du fascisme violent, en sont les plus précieux auxiliaires. L’Italie, l’Allemagne, l’Autriche, la Pologne, etc., nous en fournissent de tragiques et édifiants exemples. Et l’URSS aussi, avec son fascisme de différente étiquette, mais autant, peut-être encore davantage féroce et sanguinaire que l’autre, et d’autant plus dangereux qu’il ose toujours se parer d’une vague et pâle teinte révolutionnaire. Et, aujourd’hui, l’Espagne continue la série. Les expériences tragiques du passé n’auront donc servi de rien, sinon de répandre du sang, des deuils, des ruines, sans aucun profit pour les événements présents et futurs ?

Oui, l’Espagne que des camarades nous présentaient, voilà une longue et douloureuse année, comme le foyer de la révolution libératrice d’où avait jailli l’étincelle libertaire embrasant l’humanité enfin régénérée et affranchie de toute autorité, de tout dogme, de toute injustice, supprimant les classes sociales, richesse et paupérisme, et assurant liberté, bien-être et bonheur à tous les êtres humains. Las ! que ces belles et bonnes choses semblent loin aujourd’hui. Oui, l’Espagne de maintenant est divisée effectivement en deux camps, opposés momentanément par des questions de boutique, se disputant à qui nous dévorera. L’un, ennemi franc et déclaré ; l’autre, « frère ennemi », hypocrite en plus. Ces deux camps sont (et je n’apprends rien à personne) : le fascisme blanc représenté par Franco, ses souteneurs Hitler. Mussolini et tant d’autres en France et ailleurs, et le fascisme rouge, défendu par Staline et ses séides.

Que deviennent les anarchistes dans cette salade ? En se battant aujourd’hui contre l’un, ils « travaillent » pour l’autre. Les faits sont là, dans leur brutale et émouvante crudité, et tous les discours et articles de journaux savamment échafaudés pour essayer de prouver le contraire, ne tiennent pas debout et ne peuvent être pris au sérieux que par des naïfs ou des ignorants.

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Gênes 1960

Légende (illisible sur la photo) : Les manifestants attaquent une voiture de police. Les désordres durent deux jours et provoquent une centaine de blessés.

Le 30 juin 1960 à Gênes des emeutes ont lieu dans toute la ville contre le gouvernement Tambroni et le congrès du MSI (Mouvement Social Italien, parti fasciste créé en 1946). Une jeep de la police de Padova est brûlée piazza De Ferrari. A l’époque le MSI nouvel allié du gouvernement souhaite tenir un congrès à partir du 2 juillet à Gênes. Il souhaite également que le congrès soit présidé par Carlo Emanuele Basile, l’homme de la torture à la Maison des Étudiants (fervent collaborateur lors de la seconde guerre mondiale ; de ce lieu les cris retentissaient jusqu’à dans la rue), et qui a participé aux déportations de masse (1 600 hommes furent déportés à partir du port de Gênes pour travailler dans l’industrie de la guerre à Sesti Ponente, certains n’en sont jamais revenus). Le 30 lorsque des hommes MSI débarquent dans les hôtels de la ville ils sont jetés, les chauffeurs de taxi les laissent dans les endroits les plus inattendus, sur les tables des restaurants fleurissent des tracts anti-fascistes.

Des milliers de personnes traversent la ville. Lorsqu’à Piazza della Vittoria est proposée la dispersion beaucoup retournent à Piazza De Ferrari, d’autres restent là… Piazza De Ferrari la police tente de dégager la place en commençant par ceux qui ont escaladé la fontaine au centre de la place. La police charge, des chaises et des tables sont balancées en direction des flics, certain.es fuient dans les ruelles avoisinantes, « Les gens jetaient des pots, de l’eau chaude et de l’huile des fenêtres, », le commandant de police se retrouve dans la fontaine, ils seront emmenés dans un café un peu plus loin pour éviter un lynchage. Le congrès du MSI est annulé. Cette émeute aura de fortes conséquences politiques et est entre autres l’un des points de départ de la naissance de « mouvances autonomes » vis-à-vis du parti communiste et des syndicats, qui se dissocièrent des affrontements. 

Reformulé de différents journaux de la presse mainstream